HIROSHIMA, MON AMOUR

De Marguerite Duras

Hiroshima mon amour est un drame sentimental, plus exactement l’histoire d’une brève liaison, d’un adultère. «Elle», l’actrice française, est venue au Japon pour tourner dans un film sur la Paix. Le film s’achève, il ne reste plus qu’une séquence à tourner, elle va donc bientôt repartir en France où elle est mariée et a des enfants. Elle a 32 ans. «Lui» est japonais, architecte, également marié et père de famille, il a la quarantaine. Ils se sont rencontrés, on ne sait comment et dans quelles circonstances, peu importe, ils se sont désirés, très fortement, très sincèrement ; ils sont maintenant amants et se sépareront dans 24 heures…

Porter à la scène un texte de Marguerite Duras, m’apparaît, tout simplement, dans mon parcours de femme metteure en scène, comme une évidence ; en effet, l’oeuvre de Duras questionne ce qui constitue l’un des thèmes majeurs de ma recherche artistique, à savoir la question – inépuisable et cruciale – du désir. J’aime le regard que porte Marguerite Duras sur la question du désir, de l’amour, de la jouissance et de la liberté sexuelle au féminin. Elle a su «exalter la force de l’amour» (Laure Adler). L’héroïne de Hiroshima mon amour n’est pas une femme raisonnable ; bien que mariée, mère de famille et vivant en France, elle choisit l’adultère, lui, le Japonais ; un amour impossible et elle s’y abandonne pleinement, corps et âme : «Tu me tues. Tu me fais du bien… Dévore-moi. Déforme-moi jusqu’à la laideur…»

En outre, ce qui me plaît dans cette oeuvre, c’est la manière dont Duras traite l’Histoire, comment elle écrit l’Histoire. En arrière-plan de cette rencontre amoureuse, nous avons la guerre – la bombe atomique et l’occupation de la France par les Allemands. Duras avoue qu’il lui est impossible de parler de Hiroshima : «Tout ce qu’on peut faire c’est de parler de l’impossibilité de parler de Hiroshima. La conscience de Hiroshima étant a priori posée comme un leurre exemplaire de l’esprit.» Elle aborde des interrogations fondamentales, existentielles: celles de la mémoire, de l’indicible – face à l’horreur et à une grande douleur – de la constitution de l’être par sa réappropriation du passé. D’autre part, elle ose parler de cette violence, de cette humiliation et de ce châtiment très moyenâgeux – la tonte – que des femmes françaises ont subie à la Libération pour avoir aimé un soldat allemand.

Hiroshima mon amour est une oeuvre poétique, philosophique, et politique. Le scénario, écrit pour Alain Resnais en 1958, s’ouvre comme un long poème, sorte de méditation sur l’amour, le temps, la mémoire, l’oubli et dont l’arrière plan repose sur la violence politique… Ici, l’histoire individuelle rencontre l’histoire collective.

Christine Letailleur

Le spectacle a été créé au Théâtre de Vidy-Lausanne et au Festival Mettre en scène à Rennes en 2009. Il a tourné, en 2010/11, notamment au Trident à Cherbourg, à L’Espal au Mans, aux Feuillants à Dijon, au Théâtre des Salins, Au Toboggan à Décines, Le Carré Magique à Lannion et à la Maisons de la Culture de Nevers. Il a été représenté au Baryschnikov Arts Center à New York, aux Festivals de Perm (Russie), de Shizuoka (Japon) et de Zagreb (Croatie). En 2012, il a été repris au Théâtre National de Bretagne et au Théâtre de la Ville.

mise en scène & scénographie Christine Letailleur

avec

Valérie Lang

Hiroshi Ota

Pier Lamandé 

lumières Stéphane Colin

son Fred Morier

vidéo Jérôme Vernez

assistant à la mise en scène Pier Lamandé

 

Production déléguée Théâtre Vidy Lausanne

coproduction Théâtre National de Bretagne / Rennes, Fabrik Théâtre

Projet franco-japonais avec le soutien de Cultures france et de la Japan Foundation.